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je suis chaque fois tenté, en revenant en Pologne, de me mettre à la recherche de mes ancetres.
car mes racines familiales se perdent dans la forêt, quelque part près de la frontière avec la république tchèque.
personne, à ma connaissance, n'a cherché à remonter plus loin dans l'arbre nomade à l'écorce d'exil qu'a toujours été notre lignée, tandis que de mon côté, timidité aidant, j'ai toujours hésité à me plonger dans cette recherche.
certes elle me permettrait de découvrir un peu de qui je suis, mais n'est-il pas plus confortable, pour un artiste nomade comme moi, de se dire que les traces les plus lointaines de son identité ont disparu avec les registres ecclesiastiques d'une église forestière en ruines...
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le moins qu'on puisse dire, c'est que ce numéro que j'ai réalisé pour R>VIDEO (mais surtout toute la logistique et communication que cela a engendré) m'a épuisé
artistiquement épuisé j'entends
et j'ai maintenant envie de repos
d'ailleurs les choses que j'ai produites ces derniers jours ne me plaisent pas du tout
peut-être que cet outil, le blog, possède la faculté de vider les hommes de leur substance, contrairement à ce que nous pensions en voyant arriver cette technologie
je me souviens d'un débat similaire lors de l'apparition des tables de montage numériques
plus de ciseaux, plus de scotch, seulement une souris, et la possibilité de se tromper autant qu'on voulait, de faire tous les essai qu'on voulait, corriger, effacer, modifier, à l'infini
nous avions conclu alors que le montage numérique n'apportait ni ne retirait rien au travail, qu'il se contentait seulement de déplacer le temps de réflexion
au lieu d'avoir lieu avant, la reflexion avait lieu pendant le montage et elle était accompagnée de l'action, instantanément
ainsi dans la majeure partie des cas, les montages en numérique, au début du moins, prenaient 2 fois plus de temps que ceux effectués avec des ciseaux et du scotch
pour revenir au blog, cela pourrait donc ressembler à un film, monté en numérique,
et qu'on ne corrige jamais.
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A écrire, à écrire, j'en ai presque oublié d'annoncer la sortie du bulletin d'information de R>VIDEO> auquel j'ai participé....
J'ai honte.
Vous ne m'en voulez pas, les gars ?
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je suis déjà venu dans ce pays, ainsi que dans cette ville, à de nombreuses reprises, mais je n'y ai jamais vraiment vécu, ce qu'on appelle "vivre" quelque part.
néanmoins, vous l'aurez peut-être deviné, une partie de ma famille a ses racines plongées dans la terre polonaise.
ainsi à chaque fois que j'y retourne, mon coeur se serre et je vois flotter autour de moi les fantômes de ceux qui ont permis, bien par hasard certes, que je sois qui je suis.
on pourra peut-être un jour calculer la somme de variables constitutive de qui nous sommes, et étaler sur un graphique démesuré des chiffres à la place des fantômes. ce jour-là, nos enfants sauront précisement, historiquement, génétiquement, mathématiquement, ce qui fait qu'ils sont eux, et pas quelqu'un d'autre, car tout ne sera que courbes.
mais pour le moment, nous avançons dans la nuit, et de l'incertitude, du mystère de nous-même, nous accouchons de mondes qui n'existent pas, de fantômes, de cités noyées sous les eaux de notre ignorance.
nous vivons la fin d'un temps.
peut-être même que déjà, il n'y a plus de temps.