DECLARATION POURPRE

R>VIDEO est un espace théorique hermétique

nous donnons des pistes sur
l’utilisation massive de la vidéo personnelle
comme
contre-pouvoir esthétique et politique à l’omniprésence
et
la suprématie sans partage

des
mass-media mondiaux

notre foi en la réussite de ce projet réside dans la constatation que
la technologie est aujourd’hui parvenue à un stade d’accessibilité qui offre à chacun les moyens de production et de diffusion de messages audiovisuels signifiants

il ne suffit donc plus, pour l’individu, que de savoir quoi dire

R>VIDEO n’interrogera personne
et
ne demandera l’avis de personne

R>VIDEO encourage l’expression personnelle
et le débat horizontal à l’heure où
un ministre de la Culture propose sérieusement de transformer les studios d’enregistrement des journaux télévisés en zones de haute-sécurité

R>VIDEO ne tentera pas de pénétrer physiquement ou symboliquement dans ces lieux
[nombre de collectifs citoyens – s’ils prétendent lutter contre un système aliénant – n’en sont pas moins les assaillants d’une citadelle qu’ils désirent s’approprier]

R>VIDEO appartient à l’extérieur
nous n’avons pas besoin de nous enfuir
nous sommes déjà dehors
quand
l’intérieur pourrit de son imperméabilité

le monde audiovisuel est un espace clos
où chaque intrusion (physique et symbolique) est passée au filtre de la présentation

par la présentation,
on accole à des individus, à des groupes de pensée, une identité décomposée
en signes de reconnaissance

ces points de reconnaissance publique délimitent les individus, les pensées, et les force à la cohérence

c’est l’héritage de l’archivage historique analytique et de l’accessibilité globale de cet archivage

il n’est désormais plus possible de penser le présent autrement qu’en le définissant en fonction de son origine génétique, de sa tracabilité

pour fonder cette généalogie de l’être, les instances observatrices du présent s’appuient sur l’analyse, et le plus souvent sur la synthèse des faits, sur l’histoire limitée et aveugle d’
un monde réduit à l’amnésie de lui-même

la connaissance de ce qui a été,
ciment de la pensée du présent,
se fissure donc
et
dans ces fissures naissent des fragments de monde
qu’il convient de révéler,
ou d’inventer

toute fiction est permise
puisque
l’historien a renoncé
a chercher la vérité

toute fiction est permise
puisque
cette vérité périmée n’a d’autre utilité contemporaine
que l’asservissement du présent

toute fiction est permise
et
nous devons nous glisser dans les fissures de l’histoire passée
et
nous devons frapper le présent pour créer les fissures du monde futur
et
nous devons disparaître dans l’auto-présentation incohérente
et
nous devons nous définir en fonction d’un passé que nous aurons nous-mêmes défini
et
nous devons nous éteindre
afin de
maîtriser la conclusion de nous-mêmes
et
l’interprétation de ce que nous aurons été

1 mars 2004